Unite.ci : Docteur Doumbia Soumaïla, plus connu de la population ivoirienne sous l’appellation de Docteur Doumbia Major, a vécu comme exilé politique en France de 2000 à 2019. Il est le Président Fondateur du CPR, Congrès Panafricain pour le Renouveau, Parti politique d’obédience socialiste dont il a quitté la direction depuis son entrée à la CEI (Commission Électorale Indépendante) en tant que Commissaire en 2021. Ancien militant de la FESCI (Syndicat estudiantin dissout en 2025 ) et membre de la direction dudit syndicat, enseignant-chercheur en Sciences du Langage à l’Université Felix Houphouët Boigny, Docteur Doumbia est titulaire d’un Master en Marketing et Communication Politique, ainsi que d’un Master en Ingénierie de Projet de Développement de l’Université Paris-Est.
Véritable homme multidimensionnel, il s’affiche sur de nombreuses facettes professionnelles qui couvrent les domaines informatique, sanitaire et agricole.
Nous l'avons rencontré le lundi 3 novembre dernier a ses bureaux a Abidjan. Il s'agissait pour nous d'avoir son avis d’expert en matière électorale et surtout évoquer avec lui le bilan et les enseignements à tirer de l’élection présidentielle dans les régions du Nzi, du Bélier et pour le district autonome de Yamoussoukro où il se trouve être le Superviseur de la CEI pour ces trois régions classées en zone rouge.
Question : Quels enseignements et quel bilan faites-vous de la participation et du déroulement de l’élection dans votre zone de supervision ?
Reponse: Je voudrais tout d’abord saluer vos lecteurs et vous remercier de nous permettre de nous adresser à la population de notre zone de supervision, afin de leur faire le point relatif au déroulement de l’élection présidentielle.
Avant d’entamer mon propos je voudrais remercier la population qui est sortie massivement pour accomplir son devoir civique, remercier les Préfets de Région de Yamoussoukro, du Bélier et celui du Nzi, ainsi que tout le Corps Préfectoral, sans oublier de remercier les Forces de Défense et de Securité sans lesquelles cette élection n’aurait pas été possible. Le premier enseignement qu’on pourrait tirer de cette élection est de dire qu’en Côte d’ivoire il faut comprendre que l’élection du Président de la République n’est pas validée en lien avec le taux de Participation. Une fois que l’élection a lieu, peu importe le taux de Participation, celui qui est élu dirige le pays.
Si vous choisissez l’option du Boycott et que vos militants ne participent pas à l’élection alors que les partisans de votre adversaire y vont, vous contribuez d’une façon indirecte à favoriser l’élection de votre adversaire dont le score s’élève en termes de Pourcentage de voix favorables.
Un Boycott qui affecte quelques bureaux de vote n’entraine pas l’annulation de l’élection à l’échelle nationale. En d’autres termes, si on ne vote pas dans un ou deux villages en raison des troubles et que dans les autres parties du pays, l’élection se déroule normalement, la Commission Electorale Indépendante prendra en compte les résultats des localités où l’élection n’aura pas été perturbée pour proclamer les résultats de l’élection. Mieux, le taux de Participation calculée ne prendra pas en compte les localités où le Boycott aura eu lieu, car ces dernières ne font pas partie de celles qui ont Participé au scrutin. C’est une question de bon sens.
Question: Je suppose Docteur, que ces enseignements sont faits sur la base du bilan que vous faites de l’élection dans votre Zone de Supervision ?
Réponse: Bien évidemment, mais avant de parler du bilan, il faut avoir une idée des statistiques relatives à la population électorale de ma zone de supervision. Je pourrai vous donner à une occasion des statistiques plus fines relatives au sexe, aux tranches d’âges et à l’implantation géographique des électeurs, mais ce qu’il faut savoir globalement, c’est que pour les trois régions de ma Zone de Compétence, nous avons une population électorale de 421.555 électeurs qui se répartissent de manière suivante :
Dans la région du Bélier, nous avons une population électorale de 154.310 électeurs qui votent dans 306 lieux de vote qui comprennent 449 bureaux de vote. Dans la région du Nzi, nous avons une population électorale de 107.760 électeurs qui votent dans 218 lieux de vote qui comprennent 352 bureaux de vote. Pour le District autonome de Yamoussoukro, nous avons une population électorale 159.485 qui votent dans 119 lieux de vote qui comprennent 411 bureaux de vote.
Lorsque vous cumulez les effectifs des données par zone, vous voyez que j’ai au total 643 lieux de vote et 1212 bureaux de vote à gérer, pour une population électorale de 421.555 électeurs.
C’est donc sur la base de ces données que nous dressons le bilan du déroulement de l’élection. Sur cette base, je peux soutenir que le bilan est Satisfaisant en raison du fait que l’élection s’est globalement bien déroulée sur toute l’étendue du territoire de mes trois Zones de Supervision. Il y a eu de sérieux incidents à Yamoussoukro, à la veille du scrutin, ainsi qu’à Kpouebo et dans la sous-préfecture d’Attiégouakro, mais hormis ces trois localités, tout était sous-contrôle. Mieux, nous avons réussi à organiser les élections même dans ces trois localités où il y a eu des incidents. Il faut mentionner que nous avons eu un lieu de vote qui a fait l’objet de vandalisme à Niamkey Konankro. Il en a été de même à Dida-Kouadiokro dans la région du Bélier. Les votes ont été empêchés aussi à Lolobo, mais hormis ces incidents, tout s’est bien déroulé sur toute l’étendue de ma Zone de Supervision.
Comme vous pouvez le voir, ce n’est pas les incidents dans ces quelques lieux de vote qui pourront affecter le résultat global dans ma Zone de Supervision, à plus forte raison à l’échelle nationale. Nous avons un score de plus 30% de taux de participation dans le NZI ; un taux de plus de 64% à Attiegouakro, un taux de 39% à Yamoussoukro avec des scores allant jusqu’à 69% dans la commune de Yamoussoukro.
A Toumodi nous avons un taux de 33,9%, avec des scores avoisinant 40% à Toumodi- commune et Kokumbo. Nous avons un taux de 60% à Didievi- commune et plus de 34 % à Tiebissou Sous-Préfecture et Commune. Ces données sont suffisamment éloquentes pour indiquer que l’élection s’est bien passée dans mes trois Zones de Supervision. Il est vrai qu’il y a eu quelques dégâts matériels, mais on ne déplore aucun décès. C’est dire que l’apocalypse prévu et annoncé n’a pas vu le jour dans mes Zones de Supervision. Je voudrais à ce niveau saluer la population, les dignitaires religieux ainsi que la chefferie traditionnelle qui a su appeler les jeunes au calme et à la modération. La voix des sages a certainement minimisé les dégâts.
Question: Au sortir de l’Election Présidentielle qui vient d’avoir lieu, vous et votre équipe apparaissez aux yeux de la nation comme de véritables héros, en raison de la particularité de votre Zone de Supervision où vous avez réussi à organiser l’élection en dépit des affrontements qui ont vu le siège de la CEI partir en fumée à Yamoussoukro et la ville qui été mise sous couvre-feu. Vous avez réussi votre mission dans une zone qui était devenue un champ de bataille avec des allures de zone de guerre. Quelle a été le secret de cette réussite à laquelle on ne s’attendait pas
Réponse: Cela apparaît en effet comme une prouesse d’avoir réussi à organiser une élection sous état d’urgence avec toute la zone de Yamoussoukro qui était mise sous couvre-feu. Notre secret a été notre capacité d’anticipation et cela s’est appuyé essentiellement sur mon expérience dans le domaine de l’organisation des manifestations acquise pendant ma jeunesse estudiantine.
Vous êtes sans ignorer que j’ai été Secrétaire National à l’Organisation du Syndicat des etudiants quand j’étais jeune ! Dans la vie toutes les fonctions qu’on occupe laissent des traces sur nous et contribuent à forger notre expérience et nous doter d’aptitude qu’on acquiert.
Quand j’ai vu le matin du lundi que des manifestations étaient organisées à Yamoussoukro et qu’il y avait des affrontements à Morofe, j’ai anticipé que notre siège qui se trouve au quartier 220 logement était en danger. Je savais que notre institution était une cible de premier ordre dans l’opération de Boycott des élections. C’est cette intuition basée sur l’expérience qui m’a amené à donner des instructions pour déplacer tout le matériel électoral pour le mettre en lieu sûr, après avoir obtenu l’accord du Président de la CEI et celui du Préfet de Région. Nous avons eu aussi de la chance car si les manifestants avaient été plus stratèges nous serions tombés dans leur piège et nous aurions perdu tout le matériel électoral. C’est le lieu de saluer la capacité de délégation du Président de la CEI qui a démontré qu’il fait confiance à ses collègues en tant que force de proposition. C’est aussi ça être un bon chef d’équipe.
Il faut reconnaître que le Préfet de Region de Yamoussoukro a fait un véritable boulot de Commandant en Chef et il est à féliciter. Il en est de même pour nos forces de l’ordre détachées à Yamoussoukro dont il faut saluer le professionnalisme.
Avec l’appui du Président de la CEI qui avait anticipé ces incidents, nous avons pu déplacer notre matériel dans notre siège de substitution et tout a marché comme sur des roulettes. Merci a tous mes collaborateurs commissaires locaux, et particulièrement le Regional Balo de Yamoussoukro. Merci aussi au Régional Dosso de Toumodi qui a su gérer la situation de notre siège incendié à Kpouebo où le Préfet de Région de Toumodi a réussi à maîtriser la situation. C’est le Corps Préfectoral dans son entièreté qu’il faut remercier. A Dimbokro, le Préfet de Région était lui aussi au four et au moulin avec mes Commissaires Locaux, avec à leur tête le Regional Guontouo Kapeu.
Questions: Ne Pensez-vous pas que toute cette équipe mérite une décoration de la CEI ou du moins la reconnaissance de l’Etat?
Réponse: Nous sommes des Patriotes ; nous sommes comme des Soldats au service de la République, notre Devoir c’est de Servir.
Nous faisons notre travail, si c’est reconnu tant mieux, autrement c’est notre devoir que nous accomplissons pour notre pays.
Question: Vous avez indiqué qu’à Kpouebo dans le département de Toumodi, il y a eu des incidents ? Que s'est-il réellement passé ?
Réponse: C’est un incident mineur qui n’a pas empêché le déroulement normal de l’élection dans cette localité.
Question: Auriez-vous un message pour les populations du Bélier notamment?
Réponse: Merci à toute la population du Bélier et du NZI, qui a su préserver la paix et le vivre ensemble, dans l’intérêt supérieur de notre pays.
Réalisée par Doh Sosthène
Correspondant régional
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